Métiers en tension : les organismes de formation en première ligne

09 Septembre 2019

Métiers en tension : les organismes de formation en première ligne © Adobe Stock Comment attirer le public vers les formations aux métiers en tension ? L’enjeu du sourcing – c’est-à-dire de la recherche et de l’identification des candidats – est aujourd’hui la problématique majeure des organismes de formation.

La pénurie de compétences dans certains secteurs est régulièrement relayée par la presse. Pour y répondre, entreprises et pouvoirs publics misent plus que jamais sur la formation. Mais la volonté de former davantage sur les métiers en tension ne suffit pas. « Attirer vers ces formations est notre problématique majeure. Nous avons un potentiel de places financées, par exemple par les Conseils régionaux ou Pôle emploi, sans pour autant avoir le public attendu » expose Rémi Bordet, directeur du développement à l’Afpa.

La problématique est identique du côté du groupe Aftral, qui forme aux métiers du transport logistique. « Le sujet du sourcing de candidats devient très important dans notre stratégie », confirme Loïc Charbonnier, PDG du groupe et membre du bureau de la FFP. Ainsi, la tension est aussi du côté des organismes de formation, qui voient la concurrence s’accentuer. « Beaucoup de secteurs ont des difficultés de recrutement. Les candidats peuvent avoir des sollicitations nombreuses et sont volatils : cela demande aux organismes de formation d’être très réactifs ».

Dans un contexte économique plus favorable, où les candidats les plus employables ont déjà été recrutés, les publics disponibles pour se former sont aussi souvent davantage éloignés de l’emploi. « Les entreprises qui ont des besoins en recrutement veulent souvent de la main-d’œuvre tout de suite, alors que le temps de la formation n’est pas le même. Les publics les plus en difficulté, qui pourraient venir sur des métiers à faible niveau de qualification, ne sont pas prêts au moment où est formulé le besoin. Et celui-ci peut ensuite disparaître » pointe Muriel Pécassou, administratrice du Synofdes et directrice générale de l’Insup.

Pour attirer sur les formations aux métiers en tension et offrir un accompagnement global aux publics les plus en difficulté, les organismes de formation multiplient les initiatives : participation à des forums emploi, actions avec les entreprises, etc. « Aujourd’hui les organismes de formation ont un rôle complémentaire de celui des services de l’emploi et de l’orientation. Il y a une évolution du métier », analyse Loïc Charbonnier.

Dans cette perspective, l’Afpa a entamé un processus de transformation : « Nous développons notre stratégie pour aller vers le public, notamment le plus éloigné de la formation et de l’emploi, et non plus l’attendre. L’autre axe est de faire du centre Afpa un lieu où l’on se forme, mais aussi où l’on élargit son horizon professionnel », explique Rémi Bordet.

Les actions à mener doivent s’inscrire tout au long du parcours des candidats. Mais ce travail ne peut être accompli seul. « L’organisme de formation doit pouvoir travailler avec tout le réseau de partenaires du territoire. Cela demande un ancrage local », avertit Muriel Pécassou.

Reste la question du financement de ces nouvelles missions. « Le temps passé par les équipes sur le terrain, par exemple pour informer sur les métiers, a un coût pour les organismes de formation, qui est couvert par l’action de formation elle-même » , expose Loïc Charbonnier.

Le Pic, doté de 15 milliards d’euros sur cinq ans, apporte de nouveaux moyens. « Le Pic, et notamment ses déclinaisons régionales, amène les Conseils régionaux à penser des dispositifs en amont de la qualification. Les derniers appels d’offres montrent vraiment le souci d’avoir des programmes d’orientation des publics », analyse Rémi Bordet.

Muriel Pécassou est elle aussi favorable au déploiement du Pic dans les régions : « Les pactes régionaux sont plus réfléchis que le plan 500 000 ou le Pic d’amorçage, et courent sur plusieurs années. Nous allons peut-être avoir le temps de travailler sur le parcours des personnes et sur l’innovation pédagogique. Reste à voir quelle sera leur mise en œuvre. »

Raphaelle Pienne (Centre inffo pour Défi métiers)

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